La place du crédit dans l’organisation patrimoniale

Dans notre métier, nous sommes souvent confrontés à des problématiques liées aux actifs de nos clients. La gestion des actifs financiers, immobiliers ou du patrimoine professionnel représente la plus grande partie de notre activité.
Pour autant, la gestion du passif est toute aussi importante et permet à bon escient d’utiliser tous les leviers nécessaires à une bonne organisation patrimoniale.

Quels sont les leviers du crédit ?

Celui dont on entend le plus parler est l’effet financier. A défaut d’acheter un bien immobilier avec ses fonds propres, il est recommandé d’emprunter une partie voir la totalité du bien dans le but d’améliorer la rentabilité du projet.
Prenons l’exemple d’un bien immobilier acheté 150 000 € cash, avec un rendement brut de 5%, soit 7 500€/an de revenus fonciers.
En empruntant en In Fine 100 000 € sur 20 ans au taux de 1,7%, le montant des intérêts la première année est de 1 667€. En retranchant ces derniers des 7 500€ de revenus locatifs, le résultat est de 5 833€.
Si l’on rapporte les 5 833€ à l’apport mis dans le projet, la rentabilité du projet passe donc à 5 833/50 000 = 11,7%.

En complément du levier financier vient s’ajouter le fiscal.
En reprenant l’exemple du dessus, dans le cas d’achat via fonds propres, les revenus fonciers de 7 500€viendront augmenter la fiscalité du propriétaire. Dans le cas d’une personne ayant une TMI (tranche marginale d’imposition) de 41%, le montant de la fiscalité foncière s’élève à 3 075 €. Le rendement passe de 5% brut à 2,05% net. (Sans compter la CSG (contribution sociale générale).
Si le client choisi l’option numéro 2, la fiscalité est de 7 500 – 1667 = 5 833 € * 0,41 = 2 391€. Le résultat net revient à 5833-2391=3442€/ 50 000 (fonds propres) = 6,9% de rentabilité.

Au-delà des aspects financiers, le crédit est aussi un outil de protection social. En fonction des garanties choisies lors de la mise en place du crédit, l’emprunteur est couvert en cas de décès, perte totale ou irréversible d’autonomie, et dans certains cas incapacité temporaire totale et invalidité permanente totale. Le coût de l’assurance dépend du nombre de garantie mais aussi de la situation de l’emprunteur.
Ainsi, en empruntant le capital pour acquérir un bien immobilier, l’ emprunteur protège son partenaire à hauteur du pourcentage de protection désiré.

Les différents types de garanties

Lors de la mise en place du crédit, choisir la garantie associée est primordiale.
Vaut-il mieux choisir la caution, l’hypothèque ou l’IPPD (inscription de privilège de prêteur de deniers) ?
Il n’y a pas de réponses exactes, tout dépend de la surface patrimoniale du client mais aussi de son taux d’endettement. Dans le cas d’un couple souhaitant emprunter pour leur résidence principale avec une large capacité d’endettement, l’option pour la caution semble la plus intéressante. Tandis que pour un couple à hauts revenus avec une large surface patrimoniale, selon le niveau d’endettement, il conviendra peut-être de se tourner vers l’hypothèque ou l’IPPD pour contourner la caution logement plus stricte au niveau des critères d’acceptation.
Attention, cela ne veut pas dire que la banque sera plus souple. Cette dernière doit se couvrir contre le risque de défaut des créanciers, c’est pourquoi une estimation immobilière faite par un expert sera demandée pour fixer la valeur du bien et assurer la couverture du prêt. La banque utilise le ratio loan to value pour déterminer la valeur minimale du bien à apporter pour garantir le prêt, plus ce taux est élevé, moins la banque sera en capacité d’accepter la garantie.

C’est pourquoi la sélection du bien immobilier dans le montage du crédit est importante car si la valeur du bien à tendance à diminuer dans le temps, le taux de couverture diminue lui aussi. Ainsi la banque serait en droit d’exiger une garantie complémentaire en cas de baisse du marché immobilier. Pour se prémunir, choisir un bien immobilier dit Core ou Core+ est à privilégier.

Le crédit dans l’organisation patrimoniale

Après avoir fait le point sur les leviers et garanties du crédit, il convient de voir l’intérêt que peut avoir ce dernier dans l’organisation, planification d’un patrimoine.

L’un des sujets le plus souvent mis en avant est la succession. C’est un sujet que l’on n’aime pas aborder mais qui est nécessaire, peu importe le patrimoine détenu.
Cependant, plus le patrimoine est conséquent, plus la préparation de sa succession l’est également. Les frais de succession dépendent d’un barème dont les tranches et le pourcentage associé peuvent vite augmenter les droits.
En fonction de l’âge des clients et de leur patrimoine, les stratégies diffèrent. Prenons l’exemple d’un couple ayant deux enfants qui possèdent plusieurs biens immobiliers locatifs pour un montant de 2 millions d’euros sans crédit en face. Ils s’interrogent sur l’optimisation de la transmission de leur patrimoine.

Les clients, après avoir vu différentes solutions et sur conseil de leur conseiller optent pour l’OBO (Owner Buy out). Cette opération consiste à vendre les biens immobiliers locatifs à une société détenue par les parents (cette stratégie nécessite l’accompagnement d’un professionnel). Les parents seront usufruitiers des parts et les enfants nus-propriétaires. En contre-partie les parents recevront un capital qu’ils pourront placer sur un contrat d’assurance-vie et bénéficier des avantages fiscaux liés à cette enveloppe en termes de transmissions.
C’est à ce moment qu’intervient la mise en place du crédit. La société va s’endetter pour acquérir les biens et les échéances de prêt seront remboursées par les loyers. L’équilibre de l’opération repose sur une analyse approfondie afin d’éviter les apports en compte courant d’associer et ainsi remettre en question l’utilité de cette opération. Grâce à cette opération et le refinancement du parc immobilier, le couple à organisé sa succession et
rendu liquide leur patrimoine.

Autre exemple, un couple ayant deux enfants voulant vendre leur résidence principale d’une valeur de 2 millions d’euros. Etant proche des 70 ans et de la fin des avantages de l’ouverture d’un contrat d’assurance vie, le couple est dans l’urgence de vendre. Comment offrir la certitude au client d’ouvrir son contrat avant 70 ans tout en leur laissant le temps de vendre au prix juste leur résidence principale ?
Pour cela, il existe un crédit, que l’on peut appeler « crédit relais assurance vie », qui consiste à ouvrir le contrat d’assurance vie avec le montant de la vente future du bien immobilier. Par mesure de sécurité, la banque ne retiendra qu’un pourcentage de la valeur actuelle du bien en fonction de l’emplacement du bien immobilier et du marché. Le couple n’a besoin que de 500 000 € pour acheter leur nouvelle résidence principale, il reste donc 1,5 millions € qui seront placés sur le contrat d’assurance vie. Une fois le bien immobilier vendu, le crédit de 1,5 millions sera remboursé.

Plusieurs exemples sont possibles, comme avoir recours à une avance sur son contrat d’assurance vie pour payer les frais de successions ou bénéficier d’une ligne de crédit pour un chef d’entreprise et ainsi maitriser sa fiscalité…
Par ces différents exemples, nous pouvons dire que la gestion du passif est aussi importante que la gestion des actifs au sein d’un patrimoine. D’autant plus qu’en optimisant le premier, des opportunités de réinvestissements peuvent apparaître grâce à l’augmentation de liquidités.

Florian Bonnefous,
Fondateur d’Oxylus, cabinet de gestion de patrimoine indépendant

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